IMPOSSIBLE
Je m’appelle Jing et j’ai grandi en Chine. Depuis toute petite mes parents ne se demandent pas comment je vais ou si je suis heureuse J’ai reçu une éducation centrée exclusivement sur ma réussite scolaire puis universitaire. Très tôt je me suis intéressée à la littérature étrangère, française ou anglaise. C’est donc tout naturellement que j’ai choisi l’option langue étrangère à l’université mais aussi l’informatique car c’était le chemin le plus sûr vers une « réussite sociale ». Mes années scolaires ou universitaires n’ont pas toujours été simples. Je me sentais en décalage. Mais c’était comme ça. Mon éducation et ma culture ne m’invitaient
pas à rêver d’autre chose. Ce qui est important en Chine c’est de gagner sa vie, s’acheter un appartement et fonder une famille.
SURVIVRE
Un jour, à la librairie de l’université je découvre le roman « Une vie » de Guy de Maupassant. J’ai ouvert ce livre et je l’ai lu d’une traite, debout dans la librairie. A la même époque, mes colocataires de dortoir me racontaient que je rêvais en parlant anglais. Mon goût pour les langues étrangères se confirmait mais il fallait
penser à gagner de l’argent. Après mes études je suis donc partie à Pékin pour y travailler mais en fait le salaire que je gagnais me permettait juste de survivre et tout était difficile. Au bout de deux ans, toutes ces difficultés m’amènent à quitter Pékin pour une ville plus au sud, Shenzhen. Je travaille alors dans l’import-export, principalement en anglais. Je voyage de plus en plus pour les affaires. Grâce à ce nouveau travail, mon goût pour les langues étrangères refait surface et un jour je décide d’apprendre le français.
LA PRISE DE CONSCIENCE
Lors d’un déplacement à Taïwan pour un colloque, je rencontre un étudiant européen. Je réalise alors que si lui peut venir jusqu’ici pour ses études, peut être que l’inverse pour moi est possible ? Je me mets alors en quête d’informations mais je renonce rapidement devant les prix exorbitants engendrés par un tel projet. Je reprends donc ma vie et deviens propriétaire d’un appartement à Shenzhen.
LE DÉCLIC
Dans le cadre de mon travail, je pars travailler 3 mois en Allemagne. J’y rencontre un français qui, le temps d’un week-end, m’emmène visiter Bordeaux. J’apprécie la visite mais ne pense pas une seconde à ce moment-là que j’y reviendrai un jour. Ce n’est de toute façon pas possible, pour moi, chinoise, de penser cela. Vers la fin de mon séjour en Allemagne, je dois me rendre à Paris pour rencontrer un client. Un matin, je m’installe sur un banc du square Saint Sulpice avec un café et une viennoiserie en main, comme d’autres personnes autour de moi. A cet instant, c’est une révélation. J’aime Paris et c’est ici que je veux vivre. J’arrive alors à faire prolonger mon séjour de 3 mois à Paris. J’y rencontre rapidement mon compagnon et nous vivons trois mois magiques. La séparation le jour de mon départ n’est pas facile mais je me sens bien parce que je sais qu’il n’y a pas d’autre solution. Je vais revenir vivre à Paris.
I’M_POSSIBLE
A mon retour à Shenzhen, c’est décidé. Je me donne un an pour vendre mon appartement et pour préparer mon départ. Je décide alors de postuler à l’école de commerce de Grenoble pour un an d’étude en finance. Le jour où j’ai reçu ma lettre d’admission, c’était une libération. Ça y est. Je quittais la Chine, je partais vivre en France. Tout s’est alors enchaîné. J’ai vécu un an à Grenoble puis j’ai rejoint mon compagnon sur Paris. Au bout d’un an nous avons déménagé sur Bordeaux. L’installation et l’acclimatation n’ont pas été faciles mais j’apprends à m’épanouir, je sais que je suis là où je veux être et j’apprends à me reconnecter à moi-même.
Illustrations © Amélie Orhant
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